1. Quel état des lieux du secteur de l’assurance peut-on dresser en matière de transformation, qu’elle soit technologique, métier ou réglementaire ?
« Le marché de l’assurance poursuit sa transformation. Sur le plan technologique, les clients désormais rompus aux usages digitaux ont incité les assureurs à investir massivement dans des parcours numériques via leurs applications et espaces clients. Ces parcours ont été étendus à des produits plus complexes, nécessitant une refonte de l’offre afin qu’elle soit adaptée au digital, d’une part, et à la concurrence des nouveaux acteurs (pure players par exemple), d’autre part. Et pour cause, les assureurs poursuivent l’objectif, comme a pu le faire le secteur bancaire, d’exposer 80% de leurs produits disponibles en parcours physique via un parcours numérique afin de garantir à leurs assurés une expérience client “sans couture” et cohérente, quel que soit le canal de distribution, qu’il soit direct (web, réseaux d’agents...) ou indirect (courtage, marketplaces...). L’omnicanalité est en effet devenue un enjeu essentiel.
D’un point de vue métier, la mise en œuvre de ces stratégies numériques continue de nécessiter des transformations internes importantes, notamment dans la refonte et la modernisation des systèmes d’information back-office historiques s’orientant vers une vision client 360. Ces chantiers prennent du temps et représentent sans doute le défi le plus important pour les organismes d’assurance tant en termes d’investissements que d’acculturation de leurs collaborateurs. Ces grands programmes embarquent aujourd’hui systématiquement des initiatives en intelligence artificielle, permettant d’améliorer l’efficience opérationnelle, de personnaliser la relation client mais aussi d’aider le conseiller de clientèle à apporter plus de conseil et de service à l’assuré. À cela s’ajoutent les solutions de cybersécurité pour mieux collecter, valoriser et sécuriser la donnée qui résulte de ces activités. C’est pourquoi, la plupart des acteurs disposent désormais d’un Chief Data Officer dans leur organisation avec le plus souvent un champ d’action transverse, au-delà de la DSI, pour accompagner les collaborateurs vers cette innovation participative.
Enfin, d'un point de vue réglementaire, la pression se maintient dans l’objectif de favoriser l’accès à une couverture assurantielle qualitative tout en renforçant la protection des assurés. Dans cette optique, plusieurs lois sont récemment entrées en vigueur sur la résilience opérationnelle numérique, telles que DORA ou NIS2, et l’arrivée prochaine de la directive européenne FiDA marquera également un tournant dans l’ouverture et le traitement de la donnée financière. FiDA (Financial Data Access) permettra en effet l’ouverture des données concernant tous les produits d’assurance, hormis ceux soumis aux données de santé, à des tiers. Cette nouvelle réglementation européenne accélèrera l’ouverture des SI aux acteurs de l‘assurance d’ici 2026 et permettra de créer des écosystèmes ouverts qui, au fil du temps, iront au-delà de la simple gestion et prévention du risque pour contribuer aux défis sociétaux : changement climatique, cybercriminalité, prévention des pertes financières... »
2. Comment évolue le métier d’assureur ? À quels grands enjeux doit-il répondre ?
« Le métier d’assureur évolue dans un contexte où les pressions concurrentielles et réglementaires sont maintenant récurrentes et demeurent fortes. Le marché continue d’observer l’émergence de nouveaux acteurs qui réinventent le métier. Pour autant, si un certain nombre d’insurtechs bousculent les modèles traditionnels, aucune n’a à ce jour pénétré significativement les segments de marchés qui restent à la main des acteurs historiques (excepté ALAN qui est en train de passer du statut de startup à acteur majeur grâce au récent accord relatif à la protection sociale complémentaire).
En termes d’enjeux, les acteurs de l’assurance font face aux mêmes défis, quelle que soit leur typologie, à savoir : comment se différencier avec un produit assurantiel de plus en plus standardisé du fait de la réglementation et comment interagir avec l’assuré en dehors de l’acte assurantiel pour mieux le fidéliser ? Leurs réponses se traduisent le plus fréquemment par la recherche de la meilleure expérience client possible et par une proposition de services en complément de l’offre assurantielle permettant d’être au cœur des moments de vie de l’assuré et de faciliter son quotidien.
Pour ce faire, certains organismes d’assurance nouent des partenariats stratégiques avec des spécialistes ou bien augmentent leurs investissements dans l’univers des startups afin d’aller plus vite et plus loin. Ils se rapprochent, par exemple, des acteurs du monde de la santé ou des services à la personne et cela, dans l’objectif de lutter contre la problématique des déserts médicaux et de l’accès aux soins, ou encore d’accompagner le vieillissement de la population. Autre exemple : face au phénomène inflationniste, différents assureurs ont fait l’acquisition de sociétés expertes du marché automobile, à l’image de la Macif qui a racheté Mondial Pare-brise en 2023 pour agir contre la hausse du coût de la réparation et donc, des tarifs d’assurance automobile. Cette connexion avec le quotidien des assurés à travers des services enrichis et utiles est une tendance marquée.
Quant à l’expérience client, l’enjeu reste d’exploiter au maximum le potentiel des technologies pour l’améliorer tout en proposant le niveau de sécurité adéquat à une protection optimale des données sensibles. Les acteurs du marché doivent donc poursuivre leur application à résoudre l’équation entre promesse d’une expérience client simple et fluide et garantie de la sécurité du parcours et des données qu’il génère, comme pour les lignes de produits d’assurance vie, épargne ou emprunteur, très encadrées au niveau réglementaire et engageant des niveaux de capitaux élevés.
Le besoin de sécuriser les parcours de ces produits est donc fondamental, d’où la nécessité de recourir à des solutions numériques de confiance. Prenons l’exemple des solutions d’identité numérique pour l’entrée en relation ou encore de la signature électronique de niveau avancé, adaptée au risque juridique des documents sensibles et apportant la preuve d’identité du signataire dans le cadre d’une contractualisation. Nous constatons, à ce titre, un vrai frémissement des usages en épargne, prévoyance et santé. »