1. On parle beaucoup de la transformation des organisations, notamment en lien avec le numérique, mais qu’entend-on exactement par « transformation des entreprises » ? Quels en sont les leviers en interne ?
« La transformation numérique est désormais inéluctable et concerne toutes les entreprises, quels que soient leur secteur d'activité et leur taille: de la start-up à l'ETI, en passant par le grand groupe. Cette transformation a été initiée par de nouveaux acteurs comme les pure players dans le domaine de la prévoyance ou encore les néo-banques qui sont arrivés sur des secteurs d'activité dits « traditionnels » et en ont modifié à la fois la manière de consommer les services et la relation client. On assiste ainsi à une quête de simplification des usages qui concerne autant les clients que les collaborateurs d'une entreprise. Ce besoin de simplification touche aussi le secteur public : le citoyen souhaite avoir accès facilement à ses démarches administratives car les modes de consommation ont évolué avec le numérique et, ce faisant, tous les parcours client sont concernés.
Ainsi, dans les entreprises, la transformation numérique est devenue un sujet stratégique car elle va au-delà d'une modification des usages liés aux nouvelles technologies : il s'agit surtout de modifier des manières de travailler afin de mieux s'adapter à un marché, de fluidifier la relation client et de faciliter la collaboration et les échanges en interne notamment.
La transformation des organisations induit donc d'agir sur deux volets en parallèle :
- La transformation numérique, incontournable : cependant quand on pense « transformation numérique », on pense encore trop souvent « outils » ou « solutions », alors qu'il faut penser, en fait, plus global et réfléchir notamment à de nouvelles façons de travailler. C'est la totalité des processus et des outils qui doivent être repensés. On ne doit pas uniquement réfléchir à comment intégrer une solution d'un point de vue technique mais bien à comment déployer méthodes et outils pour garantir son fonctionnement, son acceptation et son usage au quotidien par les collaborateurs de l'entreprise et ses clients. Cela induit de recourir à de nouvelles méthodes plus agiles, plus itératives et plus participatives tels que le design thinking, l'agilité en gestion de projet, le développement d'UX (expérience utilisateur) et d'UI (interface utilisateur)... Cela a un impact en termes organisationnels avec la création de nouvelles fonctions ou directions, comme le CDO (Chief Digital Officer), le coach agile ou l'UX designer, par exemple.
- La transformation culturelle : les usages évoluent vite et cela transpire sur la manière dont s'opère l'entreprise. Nous souhaitons, en tant que manager ou collaborateur, retrouver la même rapidité d'action que celles que nous avons dans nos usages personnels (e-commerce, applications) et plus que jamais comprendre le sens et l'utilité des décisions et actions retenues. C'est donc toute la culture de l'entreprise et le management qui sont à repenser. Pendant des années, nous avons parlé de « conduite du changement » (années 90-début 2000) consistant souvent à réorganiser des services ou des directions entières. Pour un problème à résoudre, une solution était apportée : déploiement de nouveaux outils et réorganisation, et courbe du deuil en appui. Depuis 5-6 ans, nous sommes passés à quelque chose de plus systémique : il convient de gérer les évolutions en transverse et plus seulement en se contentant de réorganiser certains services, par exemple.
Par ailleurs, il est resté de cette vision orientée « conduite du changement » la notion de 80/20 : on observe qu'en pratique on a tendance à consacrer 80% du temps à des processus et des techniques et les 20% restants à l'humain. En réalité il faudrait procéder à l'inverse, mais on y vient ! Il faut passer d'une transformation très orientée sur la technologie et le numérique à une transformation centrée sur l'humain.
La technologie est certes rassurante, mais en se reposant sur des acteurs du marché experts de la transformation numérique tels que Docaposte, les entreprises peuvent se consacrer pleinement à l'aspect culturel et humain de leur transformation interne, ce qui est indispensable pour remporter l'engagement des femmes et des hommes qui font l'entreprise. Sans cela, la transformation interne sera peu adoptée ou mal perçue. »
2. Quelles sont les parties prenantes de la transformation interne des organisations ? Quels services sont les plus concernés et quels sont les bénéfices attendus ?
« La transformation n'est plus un sujet réservé uniquement à certaines directions mais concerne toute l'entreprise et ses parties prenantes. Elle démarre par l'engagement des dirigeants qui portent la vision et placent leur confiance dans les collaborateurs pour les autoriser à tester, expérimenter, innover, partager... Car pas de transformation sans innovation ! De l'implication du top management découlera celle des collaborateurs. A commencer par les managers et experts en interne : les Ressources Humaines sur la partie transformation RH en proposant de l'innovation managériale, les CDO et CTO sur la partie transformation numérique, les directions commerciales pour repenser les canaux de distribution, leur digitalisation et la transformation de la relation client qui en découle, etc.
Ainsi, pour qu'une transformation interne soit réussie, il est primordial d'associer toutes les entités, sans oublier les acteurs clés qui sont au contact des clients ou des partenaires… Mais aussi de mixer des profils différents car, à mon sens, l'efficacité de la transformation repose sur la richesse que procure la diversité en entreprise.
On l'a vu : en 2020, le confinement brutal a eu des conséquences sur la manière de gérer ses relations avec l'interne mais aussi à l'externe et en particulier avec les clients. Les bénéfices que les organisations peuvent tirer de cette transformation sont donc multiples et aujourd'hui évidents :
- Nourrir l'engagement des collaborateurs : c'est d'autant plus important dans un contexte de bataille des talents. La transformation interne donne l'occasion de travailler sur le sens de ce que chacun fait et de permettre ainsi de développer autonomie et nouvelles compétences. Elle est aussi source de fierté : les collaborateurs sont investis dans un projet motivant et utile qui aura forcément des conséquences positives en interne et en externe : simplification des outils, nouvelles manières de travailler et de communiquer, etc.
- Donner une vision claire et partager une direction : deux éléments qui permettent de rassurer les équipes. Il est important de permettre aux collaborateurs d'être fédérés dans un même élan et de participer à un projet plus grand, mais aussi d'avoir le sentiment de parler d'une seule voix, notamment auprès des clients et partenaires.
- Rendre l'organisation plus agile, flexible et adaptable. La crise que nous traversons l'a démontré : les organisations ayant entrepris ou accéléré un projet de transformation ont une meilleure capacité à réagir et rebondir en peu de temps grâce aux outils déployés, mais aussi aux modes de travail collaboratifs et au management adapté. Les clients le voient : les services rendus sont simplifiés, plus accessibles, les points d'entrée et les discours sont unifiés. »
« Les organisations ayant entrepris ou accéléré un projet de transformation ont une meilleure capacité à réagir et rebondir en peu de temps.»
3. Docaposte a lancé son programme « Transformation » en 2019 : quels en sont les grands axes et le bilan à deux ans ? Comment ce chantier de transformation interne est-il également bénéfique pour les clients et partenaires de Docaposte ?
« En effet, en 2019, Docaposte a souhaité mettre place des actions concrètes autour de la transformation, ce qui a donné lieu à notre programme Transformation que j'ai l'honneur de piloter. Filiale numérique du Groupe La Poste, Docaposte a connu une forte croissance ces dernières années, portée notamment par plusieurs acquisitions. Or, qui dit acquisitions, dit accueil de collaborateurs et collaboratrices issus de cultures d'entreprise différentes, de secteurs d'activités différents, etc. L'un des premiers enjeux de notre programme Transformation était donc d'unifier Docaposte, de fédérer ses 6 500 collaborateurs répartis entre son siège et ses 70 sites de production, et de favoriser le travail en transverse pour gagner en agilité et en efficience.
Chez Docaposte, notre transformation repose sur une équation gagnante : viser notre ambition à horizon 2025 = regarder dans la même direction + réussir les chantiers transverses définis + travailler nos postures au quotidien :
- Regarder dans la même direction est indispensable pour sceller l'unité de Docaposte. Cela passe en partie par la mise en place d'outils collaboratifs. Par exemple, nous avons développé une application disponible sur iOS et Android pour que tous nos collaborateurs puissent y retrouver les essentiels de Docaposte dont notre « one page » stratégique. Nous misons également sur une communication claire et répétée sur le sens de la transformation chez Docaposte et ses impacts sur notre organisation.
- Les chantiers structurants et transverses identifiés chaque année ont pour but de créer des synergies entre nos différentes BU, entités, marques, toujours dans cet esprit d'unité et de simplification. Suite à nos acquisitions, nous travaillons à la fois sur des chantiers industriels, sur la création de synergies commerciales du fait de l'enrichissement de nos offres, mais aussi sur le ressources management, la culture et l'identité partagées…
- Nos postures nous permettent de partager un référentiel commun pour fonctionner ensemble. Ainsi, nous avons mis en place dès 2019 notre ABCDE managérial : Agilité, Business-oriented, Coopération, Délégation aux équipes et Excellence opérationnelle. Ces postures managériales communes nous poussent à nous questionner dans notre travail au quotidien : suis-je assez orienté client, mes équipes sont-elles assez responsabilisées, autonomes, le niveau d'excellence est-il bien celui attendu par mon client, etc. ? Pour ancrer ces postures, nous proposons des séquences d'inspiration sur les innovations managériales, les pratiques gagnantes observées aussi bien en externe qu'au sein de nos entités lors de webinaires ou d'ateliers hebdomadaires à destination de nos collaborateurs, comme nos « JeudiTransfo », sur des thématiques comme le management, les modes de travail collaboratifs, etc.
Au terme des deux premières années de notre programme, nous avons dressé le bilan des 10 chantiers de transformation identifiés qui ont, depuis, donné lieu à l'adoption d'outils d'unification à part entière comme un centre ressources IT partagés, la création d'un CRM unifié et la création d'une direction relation client commune à tout Docaposte.
Pour 2021, nous avons identifié 6 nouveaux chantiers de transformation chez Docaposte. Il est important de conserver notre capacité d'adaptation, d'autant plus dans notre environnement – le numérique – en constante évolution. Par ailleurs, la crise a fait émerger de nouveaux besoins.
- Travailler autrement : un axe dans l'air du temps pour définir nos modes de fonctionnement hybrides au service d'une plus grande coopération ;
- Simplifier notre fonctionnement interne : plus on grandit, plus on a besoin de simplification ;
- Ancrer notre culture managériale : toujours et encore (rappelez-vous la règle des 80/20 à inverser) ;
- Transformer par l'innovation : en créant notamment des ponts avec nos parties prenantes (écosystèmes innovants, startups) tel que nous le faisons actuellement dans ma direction qui gère également le programme d'open innovation French IoT ;
- Incarner le numérique responsable dans toutes nos entités ;
- Miser sur une culture de la satisfaction client partagée via des dispositifs d'écoute et de mesure de satisfaction.
Par ailleurs, il faut garder en tête qu'un projet de transformation n'a jamais réellement de fin en soi et nécessite de se poser en permanence les bonnes questions. L'objectif de la transformation en interne c'est d'abord d'installer un état d'esprit pour penser à faire autrement quand cela est nécessaire et ainsi mieux s'adapter le moment venu, puis de mettre en place toutes les actions requises pour rendre chacun et chacune autonome, porteur de la stratégie et acteur au quotidien à son rythme. Cette exigence nous oblige à nous dépasser, sortir de notre zone de confort, être curieux, entretenir une culture de pionnier. Cette exigence est profitable autant en interne qu'en externe, pour nos clients et partenaires.
En tant qu'expert de l'accompagnement des entreprises dans leur transformation, nous nous devons d'incarner cette transformation. La symétrie des attentions est particulièrement importante pour nous : rendre l'avenir de nos clients plus simple n'est pas seulement la signature de Docaposte, c'est aussi notre mantra. Simplifier la vie de nos clients commence en interne, en simplifiant la vie de notre propre organisation et de nos collaborateurs. »